Publié le 12 mars 2024

Identifier une sensibilité au Propylène Glycol (PG) n’est pas une simple allergie, mais un diagnostic qui doit écarter les effets du sevrage tabagique et prendre en compte le contexte climatique canadien.

  • Les symptômes (gorge sèche, irritation) du PG peuvent être confondus avec ceux de l’arrêt du tabac (toux, aphtes).
  • La viscosité du e-liquide, très sensible aux températures extrêmes du Canada, est un facteur clé des fuites et de l’irritation.

Recommandation : Avant de conclure à une intolérance, procédez par élimination en testant des ratios PG/VG différents et en adaptant votre liquide à la saison.

Vous avez troqué la cigarette traditionnelle pour le vapotage, mais une irritation persistante dans la gorge, des rougeurs ou une toux sèche gâchent votre expérience. Votre premier réflexe, et celui de nombreux forums, est de pointer du doigt un coupable bien connu : le Propylène Glycol, ou PG. Cette molécule, pilier de nombreux e-liquides pour sa capacité à transporter les arômes et à simuler le « hit » de la cigarette, est souvent accusée d’être la source de tous les maux. On vous conseille alors de passer à un liquide 100% Glycérine Végétale (VG), en espérant que le problème disparaisse comme par magie.

Cependant, en tant qu’allergologue spécialisé, je peux affirmer que cette approche est souvent trop simpliste. Et si la véritable cause de votre inconfort n’était pas le PG en lui-même, mais une interaction complexe de plusieurs facteurs ? Imaginez que votre corps réagisse simplement à l’arrêt brutal du tabac. Ou encore, que la physique de votre e-liquide soit chamboulée par les rudes hivers et les étés humides du Canada, un phénomène souvent sous-estimé. Une véritable intolérance au PG existe, mais elle est plus rare qu’on ne le pense et nécessite un véritable diagnostic différentiel.

Cet article vous propose une démarche d’investigation rigoureuse. Nous allons d’abord apprendre à distinguer les symptômes d’une sensibilité au PG de ceux, très similaires, du sevrage tabagique. Ensuite, nous explorerons en détail les alternatives comme le Végétol et la VG, en analysant leur comportement spécifique au contexte climatique canadien. Enfin, nous démystifierons certains rôles attribués au PG pour vous permettre de faire un choix éclairé, basé sur la science et votre ressenti personnel, et non sur des idées reçues.

Pour vous guider dans cette démarche, cet article est structuré pour répondre à chaque interrogation de manière progressive. Explorez les différentes facettes de cette problématique pour trouver la solution qui vous convient le mieux.

Rougeurs ou gorge irritée : est-ce le PG ou l’arrêt du tabac ?

Le premier réflexe face à une irritation est d’accuser le produit. Pourtant, dans le cadre d’un passage au vapotage, un autre phénomène majeur est en jeu : le sevrage tabagique. Les cils vibratiles de votre système respiratoire, anesthésiés par des années de tabagisme, se réveillent et se remettent à fonctionner. Ce « nettoyage » naturel provoque souvent une toux grasse, une hypersensibilité de la gorge et parfois même des aphtes, des symptômes pouvant apparaître jusqu’à une semaine après l’arrêt. Ils sont facilement confondus avec une réaction au PG, qui se manifeste lui aussi par une gorge sèche et des picotements.

La clé est donc de procéder à un diagnostic différentiel. Les symptômes liés au PG apparaissent généralement très rapidement, dès les premières bouffées, tandis que ceux du sevrage sont plus progressifs. Un vapoteur québécois rapportait sur un forum spécialisé des pincements au cœur et un malaise général après plusieurs semaines de vape avec un liquide à 70% de PG. Après avoir été conseillé en boutique, le passage à un liquide à 70% de VG a résolu ses problèmes. Ce cas illustre bien que les symptômes peuvent être variés et qu’une simple auto-évaluation ne suffit pas toujours.

Pour y voir plus clair, il faut être méthodique. Observez la chronologie : les symptômes sont-ils apparus immédiatement ou après plusieurs jours ? Si vous arrêtez de vapoter pendant 48 heures, l’irritation diminue-t-elle drastiquement ? Si oui, le PG est un suspect crédible. Si les symptômes persistent (notamment la toux), il s’agit plus probablement du travail de votre corps qui se désintoxique du tabac.

Végétol vs PG : l’alternative bio-sourcée est-elle vraiment moins irritante ?

Si le PG est effectivement la source de votre inconfort, plusieurs alternatives s’offrent à vous. La plus connue est la Glycérine Végétale (VG), mais une autre molécule gagne en popularité : le Végétol (ou 1,3-propanediol). Contrairement au PG (1,2-propanediol) issu de la pétrochimie, le Végétol est obtenu par bio-fermentation de matières végétales comme le maïs ou le colza. Cette origine « verte » est souvent mise en avant, mais son principal avantage réside dans son profil d’innocuité : il est réputé non irritant et non allergisant. Des données compilées indiquent qu’environ 4% de la population mondiale serait allergique au propylène glycol, rendant ces alternatives indispensables pour une partie des vapoteurs.

Comparaison visuelle de la structure moléculaire du PG et du Végétol en laboratoire

Le Végétol présente une viscosité similaire à celle du PG, ce qui le rend compatible avec la majorité des matériels de vapotage et assure une excellente restitution des arômes. Il offre un « hit » en gorge satisfaisant, souvent plus doux que celui du PG mais plus prononcé que celui de la VG. Cependant, sa disponibilité au Canada reste encore limitée comparée au PG et à la VG, que l’on trouve partout. L’autre option est le e-liquide « 100% VG ». Très peu irritant, il produit une vapeur dense mais altère davantage la saveur des arômes et, de par sa haute viscosité, encrasse plus rapidement les résistances et n’est pas adapté à tous les clearomiseurs.

Le tableau suivant résume les caractéristiques de chaque composé pour vous aider à faire un choix éclairé.

Comparaison PG classique vs Végétol vs 100% VG
Caractéristique PG (1,2-propanediol) Végétol (1,3-propanediol) 100% VG
Origine Pétrochimique Bio-fermentation végétale Végétale
Irritation gorge Fréquente (hygroscopique) Rare (non irritant) Très rare
Hit en gorge Fort Modéré à fort Faible
Restitution arômes Excellente Très bonne Limitée
Viscosité Fluide Fluide Très visqueuse
Disponibilité Canada Partout Très limitée Courante

Pourquoi les arômes sont-ils plus précis dans une base riche en PG ?

L’une des qualités les plus appréciées du Propylène Glycol est sa capacité à servir de vecteur d’arômes. Si les saveurs de votre e-liquide fruité vous semblent soudainement plus fades en passant à une base riche en Glycérine Végétale, ce n’est pas une impression. Le PG possède deux propriétés fondamentales qui expliquent cette performance. Premièrement, sa faible viscosité lui permet de se mélanger de manière plus homogène et rapide avec les molécules aromatiques. Il les encapsule et les transporte efficacement jusqu’à la résistance pour une vaporisation fidèle.

Deuxièmement, et c’est un point crucial, le PG est chimiquement plus neutre que la VG. La Glycérine Végétale a un goût naturellement légèrement sucré. Cette saveur inhérente, bien que subtile, peut interagir avec les arômes du e-liquide, en arrondissant certains profils ou en masquant la complexité d’autres, notamment les saveurs de tabac « classic » ou les arômes gourmands complexes. Le PG, quant à lui, n’a quasiment aucun goût parasite. Il délivre l’arôme tel qu’il a été conçu par le fabricant, sans le colorer ni l’altérer.

C’est pourquoi les « chasseurs de saveurs » (flavour chasers) et les amateurs de e-liquides aux notes complexes (tabacs, pâtisseries, boissons) privilégient souvent des ratios élevés en PG, comme le 70/30 ou le 60/40. Ils acceptent une production de vapeur moins abondante en échange d’une précision aromatique maximale. Si vous êtes sensible au PG mais que la fidélité des saveurs est votre priorité, le Végétol représente un excellent compromis, offrant une restitution quasi équivalente à celle du PG sans ses inconvénients irritants.

L’erreur de laisser sa vape au soleil qui liquéfie le PG et cause des fuites

Un aspect souvent négligé dans les problèmes de vapotage est la physique des fluides et son interaction avec l’environnement, particulièrement pertinent au Canada. Le PG et la VG ont des viscosités très différentes, et celles-ci varient énormément avec la température. Le PG est naturellement fluide, mais il se liquéfie encore plus sous l’effet de la chaleur. Laisser votre cigarette électronique sur le tableau de bord d’une voiture en plein été ou simplement au soleil sur une terrasse est la garantie de voir votre clearomiseur fuir par les arrivées d’air.

Ce phénomène est exacerbé par une autre propriété du PG : il est hygroscopique, c’est-à-dire qu’il attire et absorbe l’humidité de l’air. Durant les étés chauds et humides de l’Ontario ou du Québec, le PG de votre e-liquide peut capter l’humidité ambiante, se fluidifiant davantage et augmentant les risques de fuites. À l’inverse, l’hiver canadien pose le problème opposé. Le passage brutal d’un extérieur à -20°C à un intérieur chauffé à +22°C provoque un choc thermique qui fluidifie instantanément un liquide riche en PG, pouvant causer des fuites inattendues si l’appareil est posé à la verticale.

La solution adoptée par de nombreux vapoteurs canadiens expérimentés est d’adapter leur ratio en fonction de la saison. Ils privilégient un ratio plus équilibré ou plus riche en VG (comme 60/40 VG/PG) durant l’été pour contrer la fluidification. En hiver, ils gardent leur matériel dans une poche intérieure pour le maintenir à une température stable et éviter le choc thermique. Cette gestion de la viscosité est essentielle pour une expérience de vape sans tracas.

Propriétés antimicrobiennes : le PG assainit-il vraiment la vapeur ?

Un argument parfois avancé en faveur du Propylène Glycol est sa propriété antimicrobienne. Il est vrai que le PG est utilisé comme désinfectant dans certains systèmes de ventilation ou purificateurs d’air. Cependant, transposer cette caractéristique au vapotage est un raccourci trompeur. Des recherches scientifiques ont montré que l’effet bactéricide du PG nécessite des concentrations supérieures à 20% maintenues en continu dans l’air ambiant, des conditions qui ne sont absolument pas réunies dans l’aérosol ponctuel produit par une cigarette électronique.

Plutôt que de compter sur un hypothétique effet assainissant du PG, une hygiène rigoureuse de votre matériel est la seule méthode efficace pour garantir une vapeur saine. L’embout buccal (drip-tip) est en contact direct avec votre bouche et l’environnement extérieur, ce qui en fait un nid potentiel pour les bactéries. Un nettoyage régulier est donc non négociable. De même, les résidus de e-liquide qui stagnent dans le réservoir peuvent s’oxyder et altérer le goût, voire favoriser le développement de micro-organismes.

L’autorité de santé publique Santé Canada a émis des recommandations claires à ce sujet. Suivre un protocole d’entretien simple mais régulier est bien plus important que le ratio PG/VG de votre liquide pour prévenir les risques sanitaires.

Votre plan d’action pour une hygiène irréprochable

  1. Quotidien : Essuyez l’embout buccal (drip-tip) avec un tissu propre et sec après chaque utilisation pour retirer les résidus.
  2. Hebdomadaire : Démontez entièrement le réservoir (clearomiseur) et rincez toutes les pièces (sauf la résistance) à l’eau tiède. Laissez-les sécher complètement à l’air libre avant de remonter.
  3. Bi-mensuel : Nettoyez les pas de vis et les connecteurs de la batterie et du réservoir avec un coton-tige légèrement imbibé d’alcool isopropylique pour assurer un contact électrique parfait.
  4. Selon l’usage (1-3 semaines) : Remplacez la résistance dès que vous percevez une altération du goût (goût de brûlé, saveurs atténuées). C’est un consommable qui ne se nettoie pas indéfiniment.
  5. Règle d’or : Ne partagez jamais votre cigarette électronique, et surtout pas votre embout buccal. C’est un objet d’usage strictement personnel.

Comment le PG capture l’eau de votre bouche et comment y remédier ?

La sensation de « gorge sèche » ou de « bouche pâteuse » est l’effet secondaire le plus fréquemment rapporté par les vapoteurs, et le principal responsable est la propriété hygroscopique du Propylène Glycol. Comme une éponge moléculaire, le PG a la capacité d’attirer et de retenir les molécules d’eau présentes dans son environnement. Lorsqu’il est vaporisé et inhalé, l’aérosol de PG entre en contact avec les muqueuses de votre bouche et de votre gorge et capte l’humidité locale, provoquant cet assèchement.

Intérieur canadien chaleureux en hiver avec vapoteur et éléments d'hydratation

Ce phénomène, appelé xérostomie, est particulièrement accentué au Canada durant l’hiver. L’air des intérieurs surchauffés est déjà très sec, ce qui diminue l’hydratation naturelle de vos voies respiratoires. Combiné à l’effet asséchant du PG, le confort de vape peut être sérieusement dégradé. Une étude menée dans des pharmacies québécoises a d’ailleurs révélé que les vapoteurs signalaient trois fois plus de cas de bouche sèche en hiver qu’en été. Pour y remédier, la première solution est simple : boire beaucoup d’eau, bien plus que votre soif ne le réclame. Visez entre 2 et 3 litres par jour.

Si cela ne suffit pas, des solutions plus ciblées existent. Les pharmaciens québécois recommandent souvent des produits d’hygiène buccale spécifiquement conçus pour la bouche sèche, comme les gels ou sprays hydratants de la marque Biotene, disponibles en vente libre dans la plupart des pharmacies canadiennes. Enfin, si l’inconfort persiste, réduire la proportion de PG dans votre e-liquide en passant à un ratio 50/50 ou en privilégiant la VG contribuera significativement à diminuer cet effet asséchant.

Hiver canadien : pourquoi privilégier plus de PG quand il fait -15°C ?

Si le PG peut causer des désagréments, il devient un allié précieux lorsque le thermomètre plonge sous zéro. Le problème majeur du vapotage par grand froid est l’épaississement de la Glycérine Végétale (VG). Très visqueuse par nature, la VG peut devenir si épaisse à des températures négatives qu’elle n’arrive plus à imbiber correctement le coton de la résistance. Le résultat est un « dry hit » : une bouffée au goût âcre de coton brûlé, très désagréable et irritante pour la gorge. C’est là que la fluidité du PG devient un avantage déterminant.

Comme le résume une image populaire sur un forum de vapoteurs québécois, qui compare les deux composés aux aliments de notre quotidien :

En hiver, la VG se comporte comme du miel au frigo, le PG comme de l’huile d’olive.

– Forum vapoteurs Québec, Guide pratique du vapotage par grand froid

Un e-liquide avec une proportion de PG plus élevée (par exemple, 60/40 PG/VG) restera suffisamment fluide, même par -15°C, pour assurer une alimentation continue de la résistance et éviter les dry hits. Le choix du ratio PG/VG en hiver est donc un arbitrage stratégique entre la fluidité nécessaire au bon fonctionnement du matériel et la production de vapeur souhaitée. Le tableau ci-dessous, adapté au contexte canadien, peut vous servir de guide.

Guide des ratios PG/VG selon la température extérieure
Température ext. Ratio recommandé Raison Astuce pratique
-30°C à -15°C 60/40 PG/VG VG trop visqueuse Gardez vape poche intérieure
-15°C à 0°C 50/50 PG/VG Équilibre optimal Préchauffez 2-3 bouffées douces
0°C à +10°C 40/60 PG/VG Conditions normales Aucune précaution particulière
+10°C et plus 30/70 PG/VG Vapeur confortable Attention aux fuites si +30°C

À retenir

  • L’irritation post-vapotage n’est pas toujours une intolérance au PG ; elle peut être un symptôme normal du sevrage tabagique.
  • La performance d’un e-liquide (fuites, alimentation) dépend fortement de la température, un facteur crucial dans le contexte climatique canadien.
  • L’hydratation est la première et la plus simple des solutions pour contrer l’effet de bouche sèche causé par le caractère hygroscopique du PG.

Comment la VG transforme-t-elle la texture de votre vapeur en velours ?

Si le Propylène Glycol est le roi de la saveur et du « hit », la Glycérine Végétale (VG) est la reine incontestée de la vapeur. Sa structure moléculaire plus complexe et sa viscosité élevée lui permettent, une fois chauffée, de produire un aérosol beaucoup plus dense, blanc et abondant. La sensation en bouche est radicalement différente : là où le PG procure un picotement sec et bref, la VG offre une rondeur, une onctuosité presque palpable, que beaucoup décrivent comme une vapeur « veloutée ».

L’impact sur le volume est quantifiable : des tests comparatifs montrent qu’un e-liquide à 70% de VG produit environ trois fois plus de vapeur qu’un liquide à 30% de VG, à puissance et matériel équivalents. C’est pourquoi les amateurs de « cloud chasing » (la pratique de faire de gros nuages de vapeur) utilisent exclusivement des liquides « High VG », avec des ratios de 80% ou même 90% de glycérine. Cette vapeur abondante et douce est aussi souvent perçue comme moins irritante pour les personnes sensibles.

Cependant, cette texture veloutée a un coût. La haute viscosité de la VG la rend plus difficile à vaporiser. Elle nécessite un matériel adapté : un atomiseur dit « sub-ohm » avec de larges arrivées de liquide et d’air, et des résistances de faible valeur (inférieures à 1.0 ohm) capables de chauffer fortement. De plus, la VG encrasse les résistances beaucoup plus rapidement que le PG, ce qui implique un budget de maintenance plus élevé et des nettoyages plus fréquents. Encore une fois, c’est une question de compromis entre le volume de vapeur, la sensation en bouche et les contraintes matérielles.

En définitive, trouver le bon équilibre n’est pas une science exacte mais une démarche personnelle. L’expérimentation est la clé. Commencez par un ratio équilibré de 50/50 PG/VG, puis ajustez progressivement en fonction de votre ressenti, de la saison et de vos préférences en matière de saveur et de vapeur. Écoutez votre corps et n’hésitez pas à tester les différentes alternatives pour composer l’expérience de vapotage qui vous est propre.

Rédigé par Isabelle Fortin, Pneumologue et spécialiste en tabacologie clinique. 18 ans d'expérience hospitalière dans le traitement des maladies respiratoires et l'accompagnement au sevrage tabagique.